FOOT – INTERVIEW : ENTRE VIE PERSO ET PRO, RICARDO ADÉ S’EXPRIME À CŒUR OUVERT [1]
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FOOT – INTERVIEW : ENTRE VIE PERSO ET PRO, RICARDO ADÉ S’EXPRIME À CŒUR OUVERT [1]

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Le défenseur international haïtien, Ricardo Adé, qui évolue en terre chilienne depuis tantôt trois ans (Santiago Morning), a changé de cap et rejoint le CD Magallanes. Celui qui a eu le privilège de devenir le premier joueur haïtien à être capitaine d’un club professionnel au Chili, a décidé de se confier à la rédaction de FOOTKOLE. Entre vie personnelle ou/et professionnelle, le Saint-Marcois, qui semble avoir trouvé la bonne formule pour rallier les deux bouts, s’exprime à coeur ouvert. La rédaction de Footkole vous propose la première partie de cette interview exclusive !

Footkole : Bonsoir Adé, encore merci d’avoir accepté de répondre à nos questions. Pour commencer, présentes-toi à nos internautes !

Ricardo Adé : Je suis Ricardo Adé. Je suis de Saint-Marc, et j’ai grandi là-bas. J’ai 30 ans. Je suis footballeur professionnel, vivant actuellement en Amérique du Sud, au Chili pour être plus précis.

F.K : Depuis combien de temps vis-tu au Chili et comment y es-tu arrivé ?

R.A : Je viens juste d’entamer ma quatrième année au Chili. J’y suis arrivé par mes contacts au sein de mon ancien club semi-professionnel, le Miami FC (USA). J’évoluais au sein du Don Bosco FC de Pétion-Ville quand je jouais la Ligue des Champions de la Concacaf, et à la fin de l’année, j’ai reçu un appel du président de Miami United qui m’a annoncé avoir reçu une offre me concernant, pour le Chili. Je n’avais aucune idée du championnat. Certes, je connaissais la sélection chilienne, leur beau parcours en Copa America et tout. Mais, je ne savais rien à propos du pays. J’ai tout de suite effectué quelques recherches en ligne sur le niveau du championnat et je me suis dit, c’est une opportunité qui se présente, je vais la saisir. Mon premier club a été le Santiago Morning, et maintenant, je suis à ma deuxième saison avec le Deportivo Magallanes.

FK : Pourquoi ce changement de club, et qu’est ce qui t’a motivé ?

R.A : C’était une décision footballistique. Après 2 ans au sein d’un club, on cherche tous un renouvellement (nouveau challenge) en tant que joueur. À dire vrai, je n’ai pas reçu l’offre que j’attendais du club pour continuer.

F.K : Comment s’est passé ton adaptation au Chili, était-ce difficile, la langue a-t-elle constituée une barrière et était-ce facile de communiquer avec tes partenaires aux entraînements ?

R.A : Au début, je me sentais perdu. Je ne connaissais personne ni les joueurs ni le style de jeu…. J’ai vécu un enfer durant les 3 premiers mois. Je devais sortir me ravitailler, et je ne parlais pas l’espagnol. Les gens que je rencontrais ne parlais même pas un peu l’anglais. Mais sur le terrain, dès que tu sais ce que tu dois faire, les mots-clés…. ça devrait aller. J’ai dû l’apprendre afin de pouvoir mieux communiquer avec mes partenaires sur le terrain.

FK : On sait qu’au Chili, il y a une grande communauté haïtienne. Comment a été l’accueil et qu’as-tu ressenti par rapport à ces gens là ?

R.A : Il faut dire que la vie au Chili n’est pas du tout facile. Les gens sont là à la recherche d’un mieux être. L’horaire des matchs ne leur convient pas toujours. Mais, ils m’ont souhaité la bienvenue sur facebook surtout et instagram. Je leur reponds toujours, parce que j’aime communiquer avec les fans, peu importe le commentaire, soit négatif ou pas. Je les invite à venir aux matchs et quand ils viennent, je prends du temps pour leur parler….

FK : Est-il important pour toi d’aller vers les fans ?

R.A : Beaucoup (rires…). Nous sommes tous des humains. Je suis certes un joueur de foot, je suis reconnu et ça me place à un niveau où les gens me voient comme un exemple. Mais, je ne me considère pas plus important que les autres. Ça me fait du bien de lire leurs commentaires. Certes, les commentaires negatifs dérangent pour un bref instant, mais ils me permettent de m’auto-évaluer et de m’améliorer.

FK : Tu es capitaine. Qu’est ce qui, selon toi, a motivé le club à te choisir ?

R.A : Je dois dire que je fais partie de la liste des capitaines depuis ma 1ère saison au sein du club. Pour une raison ou une autre, ça n’a fait la UNE que cette saison. Depuis mon arrivée au sein de Magallanes, la majorité des joueurs me voient comme un exemple, un étranger qui sait ce qu’il veut, respectueux, discipliné, toujours à l’heure aux entraînements. Les dirigeants aussi me voient comme un leader qui peut aider l’équipe dans un sens.

FK : Quel sentiment tout cela te procure t-il personnellement ?

R.A : Cela me rend fier. Ça me fait plaisir d’être le 1er Haïtien capitaine en terre chilienne. Mais, je ne veux pas être le seul à le faire. Je sais qu’il y a beaucoup d’autres Haïtiens qui sont talentueux. Je suis là pour ouvrir la voie. Beaucoup d’Haïtiens critiquent le championnat sans prendre le temps de s’en informer. Le championnat chilien a un bon niveau et je pense que beaucoup de jeunes Haïtiens peuvent débuter leur carrière ici pour aller beaucoup plus loin.

F.K : Quel coéquipier t’a le plus impressionné ?

R.A : Ils sont nombreux. Certains ne sont pas arrivés au sommet malgré leur talent. Mais, je peux citer un joueur de la sélection nationale qui est un idole, une icône à mes yeux, Mechack Jérôme. On a joué ensemble au Baltimore SC de Saint-Marc, et aussi en sélection nationale. J’ai beaucoup appris de lui. Il y en a d’autres qui ont énormément de talent, mais pour une raison ou une autre, un problème de passeport par exemple, ils ne sont pas parvenus à lancer leur carrière à un plus haut niveau.

FK : Justement, tu as évoqué le problème de passeport. On sait qu’à cause d’un problème plutôt similaire, tu n’as pas pu participer entièrement à la dernière Gold Cup. Peux-tu nous en dire plus ?

R.A : C’était une erreur de ma part, je ne vais pas rejeter la faute sur quelqu’un d’autre. J’avais un visa de touriste lorsque je jouais à Miami. Je leur avais demandé de m’aider en ce sens parce que je savais que c’était contraire à la règle de jouer avec ce visa. Ils me l’avaient promis, mais ils ne l’ont jamais fait. Je suis donc retourné en Haïti. Cet expérience m’a beaucoup appris, et c’est aussi l’une des raisons pour lesquelles je suis encore à ce stade de ma carrière. Mais, comme on dit, quand une porte se ferme, une autre s’ouvre. Il faut la chercher et la trouver. C’est ce que j’ai fait, et c’est pour ça que je suis au Chili en ce moment. Je ne me suis pas lamenté sur mon sort. J’ai eu donc un try-out au Portugal et je devais passer par les Etats-Unis. À l’immigration, ils m’ont posé des questions et finalement, mon visa a été annulé pour 5 ans. Malgré toutes les tentatives effectuées, même auprès de la sélection pour trouver juste un permis de voyager avec la sélection pour les matchs, la situation n’a pas changée. Mais maintenant, je peux vous assurer que je serai présent avec la sélection pour n’importe quel match aux Etats-Unis.

R.A : Quels bons souvenirs gardes-tu en tant que joueur, en club et en sélection ?

FK : En club, je peux dire que c’est la fierté d’avoir été, avec le Baltimore SC de Saint-Marc, champion national, d’avoir joué la Ligue des Champions de la CONCACAF avec le Don Bosco FC de Pétion-Ville, aussi de représenter le pays à l’échelle internationale. Le dernier exploit en Gold Cup 2019 où j’ai joué un seul match, certes, mais c’était comme si j’avais fait tout le parcours avec mes coéquipiers, vu la façon dont je me sentais au sein du groupe. Nous étions une famille. Nous étions unis. C’est un exploit auquel je fais partie.

FK: Adé 4. Pourquoi le 4, est-ce un choix personnel, ce numéro veut-il dire quelque chose pour toi ?

R.A : J’ai toujours aimé le 6, mais aussi le 4. Au Baltimore SC de Saint-Marc, je portais le numéro 6. Au Santiago Morning, j’ai commencé avec le numéro 27 lors de ma première saison. Mais, Sergio Ramos est mon idole, je le suis de près. Il porte le numéro 4. Donc, j’ai fini par exiger le 4 lors de ma deuxième saison et depuis c’est devenu mon numéro fétiche en club et en sélection.

FK : Sur Instagram, on voit souvent Ade4las, c’est quoi 4las ?

R.A : Rires… le 4las ne fait pas partie du football. Même ici au Chili, quand ils écrivent quelque chose à mon intention, ils mettent 4las. Les 4 las c’est juste un groupe de 4 amis. On se considèrent comme des frères.

Nathalie Antoine / Footkole


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