CHFP 2018 – ANALYSE : L’AS SUD-EST, CHRONIQUE D’UN MAL PROFOND
L’aventure de l’AS Sud-Est dans l’élite du football haïtien a pris fin après seulement deux saisons. Une véritable catastrophe, qui entre autres, est le résultat d’un mal beaucoup plus profond. Explication !
L’AS Sud-Est a terminé sa saison avec 32 points, insuffisants pour la sortir de la zone rouge ou encore moins pour le maintenir dans la plus haute échelle du football haïtien (D1). L’aventure de la formation jacmélienne, qui a débuté en 2017 en D1, a connu un véritable coup d’arrêt brutal. En effet, les observateurs ne sont guère étonnés, car cela semblait quasiment inéluctable au regard des signes avant-coureurs. Le mal était donc bien profond avant que la descente en enfer de la deuxième division ne vienne porter le coup fatal au football jacmélien.
L’ENVIRONNEMENT DE L’ÉQUIPE
Belle et jeune fleur aux senteurs parfumées et exquises, l’ASSE, dès sa formation était courtisée par tant de prétendants que les cadeaux et les mots doux pleuvaient de part et d’autre. Fascinant par le jeu prôné à ses débuts et les résultats obtenus au cours de sa première année en D1, elle a été l’attraction principale du public jacmélien.
Cependant, la lutte pour la main de la princesse allait déboucher sur des luttes d’influence entre plusieurs personnalités : “Kabrit ki gen twop mèt, mouri nan poto” dit l’adage. De plus, cette formation allait connaître des problèmes économiques récurrents qui, disons-le, avec une meilleure collaboration entre les bailleurs, auraient pu être moindre.
L’Association Sportive du Sud-Est, n’ayant pas été perçue dès le départ comme un projet à long terme ou comme une institution pérenne, n’a été que l’occasion pour les bailleurs de se positionner en vue d’avoir la plus grande visibilité possible. Le moi personnel a primé sur le collectif. Ces querelles extrasportives ont eu des incidences néfastes sur la bonne marche de l’équipe.
L’ADMINISTRATION
Hormis l’environnement général, l’équipe a été minée par les problèmes d’ordre administratif. Entre improvisations, manque d’expérience, luttes intestines et incompétences, l’administration de l’AS Sud-Est a été dans l’ensemble un fiasco. Si certains responsables ont montré une volonté certaine de prôner une nouvelle vision au sein de l’équipe avec des plans précis, ils se sont parfois heurtés à d’autres membres du comité qui ne partageaient pas leur vision.
En outre, fort souvent, l’administration n’a pas fait des investissements intelligents surtout en ce qui concerne le recrutement. Notons à titre d’exemple, le cas de Richardson Pierre, remplaçant au Don Bosco FC, recruté pour 2000 dollars US alors que l’équipe faisait face à des difficultés économiques graves. Qui plus est, il n’a joué qu’une demi-saison à l’ASSE, n’a marqué qu’un but et est parti libre. C’est aussi le cas de Pierre Louis Yves Pierrot (actuel joueur du FC Petit-Goâve), de Georgy et de Morguens Jean Baptiste. Ces derniers ne sont que des joueurs d’un niveau qui laisse à désirer. Bref, avant leur venue à l’ASSE, ils ne faisaient que cirer le banc la majeure partie du temps. Au fait, ces achats de joueurs ne sont que de l’argent jeté par la fenêtre alors que les caisses de l’équipe étaient au plus bas.
D’autres cas mal gérés peuvent être aussi évoqués comme celui de Carlens Franck (parti libre au FICA), de Monumat Constant Junior (Racing Club Haïtien), de Jean Junot Valentin ou encore Sanon Styve (tous deux partis au Violette). Ces joueurs ont été des éléments clés de l’équipe. Le plus étonnant, c’est que leurs transferts n’ont rien rapporté à l’équipe financièrement.
Outre ces choix pour le moins insolites, le manque de savoir-faire de certains membres. Que dire de leur vision, s’il faut en parler, qui était tout simplement criant et alarmant. Qu’a fait le responsable de Marketing pour attirer les sponsors ? Le responsable de communication du club avait-il communiqué le nom des nouveaux joueurs à la presse au cours des six derniers mois ? Certains sponsors qui ont accompagné l’équipe lors de sa montée en D1, ont abandonné le club cette saison, et pourtant, rien n’a été dit ni fait réellement pour palier à ces graves problèmes.
En dépit du fait que certaines personnalités du dernier comité ont investi leur avoir dans l’équipe pour assurer sa survie, la vision arrêtée des autres membres ont entraîné l’équipe dans un cycle de *mendicité* au lieu de définir de réelles stratégies pour trouver les ressources nécessaires à sa bonne marche.
LE STAFF TECHNIQUE
Le staff technique n’est pas exempt aussi à la descente de l’AS Sud-Est. Avec un bilan de 16 défaites, seulement 9 victoires en 30 journées de championnat et 43 buts encaissés (pire défense du championnat), on ne peut ne pas questionner les choix tactiques voire la qualité du jeu offert et les stratégies de match mises en place par le staff technique. En effet, l’équipe a perdu : 14 de ses 15 matches disputés à l’extérieur et 23 de ses 24 derniers matches joués hors de ses bases en championnat.
Si la pression est sur toutes les équipes en déplacement, pourquoi l’ASSE est-elle la seule à ne jamais gagner depuis un an ? Est-ce tout simplement la faute des joueurs ? Ne pouvait-il pas (le staff technique) mettre en place une stratégie pour y remédier ? Nous pouvons aussi pointer du doigt le recrutement qui relève aussi de la compétence du staff technique qui recrute des joueurs qui, au lieu de renforcer l’équipe, sont carrément inutiles et budgétivores.
Au regard de ces éléments, force est de constater que la relégation de l’AS Sud-Est ne relève pas du hasard mais est la conséquence d’un ensemble de maux, de mauvais choix et de dysfonctionnements qu’on a parfois essayé de nier pour chercher des bouc-émissaires.
Le mal est réellement Profond !
On est en droit finalement de se demander : quelles sont les perspectives pour la prochaine saison? Va-t-on enfin repenser le football jacmélien en posant les vrais problèmes ? Tout un tas de questions qui mérite bien une réponse.
On verra bien ….
DOMOND WILLINGTON / FOOTKOLE
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