MONDIAL U20 FRANCE 2018 : LES DESSOUS DE LA REQUÊTE DE LA FHF, SIX QUESTIONS À YVES JEAN BART.
Après avoir joué les éliminatoires amenant au mondial U20 français 2018, Melchie D. Durmonay et Tabita Joseph, deux éléments inamovibles du dispositif tactique et technique de l’équipe haïtienne, ont passé tout près de rater le rendez-vous sacré. En fait, elles ont failli tomber sur l’une des règlements de la compétition qui stipule clairement que toute joueuse née après le 31 décembre 2002 n’est pas éligible.
Toutefois, grâce à une requête du N° 1 du football haïtien ponctuée d’une réponse positive de la FIFA, ces filles prendront part finalement au mondial français. FOOTKOLE vous présente sur un plateau en or les dessous de ce sujet.
Président Jean Bart, pourquoi avez-vous soumis une requête à la FIFA? Avez vous dès le départ cru pouvoir obtenir gain de cause ou c’était juste une tentative désespérée?
Vous avez bien dit. On a hésité longtemps avant d’en arriver à cette décision, d’autant que la FIFA est intransigeante dans l’application des règlements. Elle met du temps pour les sortir, mais quand ils sont publiés, ils sont inflexibles dans leur application.
Nous avons longtemps hésité voire pensé à abandonner à un moment donné de déposer une demande de dérogation. Surtout que certains de grands pontifes de la FIFA approchés sur la question nous en dissuadaient.
Et au niveau de la fédération, nous étions pressurés par les cadres qui insistaient. Chaque jour. ils venaient avec plus d’arguments
Nous avons donc eu une très longue période de réflexion à l’interne ; de tous les amis, de tout le personnel, le plus dur venait des filles auxquelles, on a caché la nouvelle espérant ne devoir jamais leur annoncer la nouvelle. La pression la plus insupportable était le regard des filles directement concernées même quand elles ne savaient rien de ce bannissement.
Coach Collat et les managers qui tournaient autour de l’équipe insistaient pour que nous nous lançions dans la bataille.
L’approche du départ pour le tournoi du “Sud ladies cup ” nous avons décidé à nous jeter; on a rassemblé tous les arguments et écrit un solide document, envoyé une semaine avant le congrès de Moscou, mais vraiment sans grand espoir certes, mais avec la ferme conviction.
À Moscou, on fit un formidable travail de lobbying auprès des membres du comité des dirigeants de confédérations; Monique André, au sein du comité des femmes, mobilisa les rares femmes influentes à la FIFA lors de diverses réunions de femmes leaders de football.
Après le congrès de Moscou et lors du match d’ouverture, j’ai trouvé une oreille attentive du président Infantino qui nous avoua travailler sur le dossier. Je pense aussi aux longues conversations et autres échanges que nous avons eus avec Sonia Bien-Aimé, membre féminin du comité de la FIFA.
Vous avez eu quelque part un esprit positif, puisque ces filles, la semaine dernière, ont complété le groupe en France?
De retour à port au Prince, la pression devenait infernale pour constater que ces enfants étaient abîmées. Certaines abattues avec des idées noires traversant l’esprit.
Alors on a résolu comme palliatif de les faire voyager en France et les amener plus près de la scène surtout après la déception de la non-qualification bêtement en U17
Par ailleurs, On continua à insister auprès de beaucoup de Fédérations même si c’était difficile car apparemment nous étions la seule association dans cette situation. On insistait chaque jour persuadant la FIFA qu’elles avaient aidé Haïti à arriver à ce stade et qu’il serait cruel pour ces filles de ne pas être récompensées du fruit de leurs efforts, et aujourd’hui, nous sommes fiers que notre demande a été acceptée par la FIFA.
FOOTKOLE a appris que vous avez laissé le pays, est ce que ça a un quelconque rapport avec le dossier?
Je vais à Moscou pour la finale,
à laquelle j’ai été invité et j’hésitais, mais je vais pour dire merci au nom de ces gamines à la FIFA , merci aux dirigeants d’avoir compris qu’il s’agissait d’un drame humain et sportif et merci de l’avoir compris ainsi.
Nous savons combien la FIFA est stricte sur l’application des règlements, mais Haïti, en a été une exception. Qu’avez vous fait d’exceptionnel?
C’est devenu une force pour le football haïtien qui est très respecté dans le monde, malgré la situation générale du pays. Avez vous remarqué que le Japon , l’Argentine nous invite à venir jouer avec leur équipe nationale? Avez vous remarqué que les américains numéro 1 du monde en football féminin nous ont invité à jouer en décembre dernier? Avez vous noté que les américains organisent un tournoi U20 garçons en septembre et ils nous ont invité à jouer chez eux à Bradenton? Justement parce qu’ils savent que nous sommes sérieux et qu’ils ont à apprendre de nous et de notre football. On est sérieux et on ne met pas nos problèmes en avant en tout ; nous luttons , nos jeunes sont passionnés, talentueux et nos coaches sont motivés , nos dirigeants sont presque malades et veulent que dans le football Haïti ne soit pas sans grade.
Vous avez parlé de Lobby, comment avez-vous procédé?
Toutes les confédérations du monde ont été saisies du dossier. Toutes les fédérations ont été touchées. Tous les membres du comité de la FIFA ont eu à parler indistinctement y compris nos amis cubains et madame Bien-aimé. Monique André a mobilisé ses ami(e)s, Carlo a motivé plusieurs de ses collègues Et Rosnick Grant a travaillé beaucoup, un travail d’équipe qui a donné du résultat.
Le résultat est là, vous adressez quelques mots aux fille?
Je leur souhaite une bonne coupe du monde ; nous éviterons à l’avenir en demandant que les règlements soient promulgués avant même les éliminatoires et en nous y conformant strictement que nous ayons à mener de tels combats à l’avenir.
LL & EA / FOOTKOLE
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